Balance

En France, les inégalités sociales se creusent encore : quel bilan en 2021 ?

June 2021

L’Observatoire des inégalités vient de publier son rapport bisannuel sur la situation des inégalités sociales en France. Comme tous les deux ans, c’est l’occasion de constater qu’elles ne cessent de croître, particulièrement chez les jeunes : augmentation de 50% du taux de pauvreté, précarisation de l’emploi, difficultés d’accès à l’éducation supérieure pour les plus pauvres, le tableau est sombre. Les femmes, les ouvriers·ères et les immigré·e·s continuent eux·elles aussi de subir les effets des inégalités sur leur vie.

La publication du rapport bisannuel sur les inégalités sociales en France par l’Observatoire des inégalités permet de faire le point et de donner des statistiques précises sur un vaste ensemble de problématiques. Quelques chiffres permettent d’apprécier en un coup d’œil le chemin qu’il reste à parcourir pour atteindre une société plus juste et solidaire.

Revenus : augmentation du taux de pauvreté, en particulier chez les jeunes

  1. Le revenu médian est de 1771€. C’est-à-dire que la moitié de la population française gagne plus que cette somme, et que l’autre moitié gagne moins. Les 10% les plus pauvres vivent en moyenne avec 715€ par mois. Les 10% les plus riches, avec 5090€. Ces dernier·ère·s possèdent également à eux·elles seul·e·s la moitié (46,4%) de l’ensemble du patrimoine des ménages.
  2. Le taux de pauvreté (la part de ceux qui vivent avec moins de 885€ par mois) est passé de 7.7% en 2009 à 8,2% en 2019, soit 500.000 personnes supplémentaires. 5,3 millions de Français·es vivent dans la pauvreté.
  3. Chez les jeunes de 18 à 29 ans, ce même taux est passé de 8,2% en 2002 à 12,5% en 2018, soit une augmentation de 50%. C’est la population pour qui la situation financière s’est le plus empirée ces quinze dernières années.

Éducation : le milieu de naissance d’un enfant influe toujours sur le reste de sa destinée sociale

Le système éducatif français est notoirement connu pour être l’un des plus inégalitaires d’Europe. L’origine des parents, leur niveau d’éducation et de revenus pèsent lourdement sur l’éducation de leurs enfants et le niveau d’étude qu’ils·elles parviendront à accomplir.

  1. 34% des enfants d’ouvrier·ère·s font un baccalauréat professionnel (équivalent au CESS professionnel) alors que seulement 16% suivent la filière générale. Pour les enfants de cadres supérieur·e·s, la proportion est inverse : 35% font une terminale générale, 8% un baccalauréat professionnel.
  2. Alors que la classe ouvrière représente 40% de la population, seulement 12% des universitaires sont issus de parents ouvrier·ère·s. Ce chiffre tombe à 5,9% pour les doctorant·e·s, et même à 0% pour les étudiant·e·s en Polytechnique. Pour les grandes écoles en général, 65% des étudiant·e·s proviennent d’un milieu favorisé, et 8% d’un milieu défavorisé.

Travail et modes de vie : être ouvrier·ère vous fait mourir six ans plus tôt qu’un·e cadre supérieur·e

  1. À cause des mauvaises conditions de logement, du tabagisme plus fréquent, d’un moindre accès aux soins de santé et d’un travail souvent éprouvant physiquement, un·e ouvrier·ère peut espérer vivre jusqu’à 77,6 ans en moyenne contre 84 ans pour un·e cadre supérieur·e. Un·e ouvrier·ère sur six est victime d’un accident de travail chaque année, soit quatre fois plus de risques que pour un·e cadre supérieur·e.
  2. En France, plus d’un·e jeune travailleur·euse sur deux font face à la précarité de l’emploi (intérim, CDD…). En 2019 ils sont 52,7% des jeunes travailleurs·euses de 15 à 24 ans à être dans cette situation, soit 5,7% de plus qu’en 2009.
  3. À cause des discriminations à l’embauche, les immigré·e·s né·e·s hors de l’UE sont deux fois plus au chômage qu'un·e Français·e né·e en France. La même logique s’applique pour les services d’État : 22% des hommes qui se disent Arabes déclarent avoir été contrôlés plus de cinq fois par la police au cours de ces cinq dernières années. Cette proportion est dix fois plus élevée que celle déclarée par les hommes blancs.
  4. Bien que le statut des femmes dans la société continue de progresser lentement, elles sont toujours deux fois plus nombreuses que les hommes à passer au moins une heure par jour à la cuisine et au ménage.

Les chiffres de ce rapport sont néanmoins à nuancer. Puisqu’il a été publié maintenant, il ne peut pas encore tenir compte de l’impact économique et social de la pandémie de Covid-19 sur ces minorités. Sans action conséquente de la part des acteurs sociaux, ces statistiques risquent bien de continuer à s’aggraver dans les années à venir.