Les maisons médicales acteurs de l’économie sociale

Depuis leur fondation, les maisons médicales fonctionnent en autogestion et selon un mode non-hiérarchique… Par leur finalité de service à la collectivité, leur processus de décision démocratique et la primauté qu’elles donnent à la personne sur le capital, elles font partie du secteur de l’économie sociale. Elles ont cependant développé des manières de fonctionner spécifiques qui apportent un éclairage nouveau au secteur de l’économie sociale.

Nées du mouvement de contestation politique de la fin des années 60, les maisons médicales proposent de transformer radicalement le système de santé, avec une manière d’appréhender la médecine et le patient de façon beaucoup plus globale. Très proches des alternatives économiques fédérées au sein de Solidarités des alternatives wallonnes et bruxelloises (SAW-B) dans les années 80, les liens se sont petit à petit distendus. En 2006, la Fédération des maisons médicales et SAW-B fêtaient toutes deux leurs vingt-cinq ans d’existence. Une occasion pour se re-connaître et mettre en évidence les valeurs et objectifs communs. De même que retracer les questions qui traversent leurs membres respectifs et imaginer des projets futurs de collaboration.

Des objectifs et des modes de fonctionnement d’économie sociale

Les maisons médicales poursuivent clairement une finalité de services à la collectivité avec un ancrage local fort. Leurs objectifs sont décrits de la manière suivante :

  • « Développement d’une politique de santé globale et cohérente, basée sur le principe « penser globalement, agir localement », et orientée sur les soins de santé primaires, voie d’accès la plus rationnelle au système de soins de santé. Cette politique doit être fondée sur l’étude des besoins de santé de la population et l’évaluation des services. Elle implique une organisation centrale coordonnée des soins de santé, une dispensation décentralisée permettant la participation de la population, l’adaptation de la formation des intervenants et le développement de la recherche action en soins de santé primaires.
  • Développement des fonctions de synthèse, d’information, de communication et de relais propres aux soins de santé primaires. Poursuite de la recherche, de l’expérimentation et de l’exercice de nouveaux modes de financement des soins de santé répondant aux inadéquations des systèmes de paiement actuels.
  • Maintien de la solidarité et notamment de la sécurité sociale, garante de l’accessibilité et de l’équité du système de soins de santé. »

Depuis 1994, un décret régional (Bruxelles et Wallonie) régit les associations de santé intégrées, autrement dit les maisons médicales, et détermine les missions de celles-ci à savoir : la dispensation de soins de santé primaires (médecine générale, kinésithérapeutes, infirmiers), la réalisation d’activités communautaires en santé, la récolte de données épidémiologiques et la prise en compte des aspects psycho-sociaux. De nombreuses activités d’Education permanente sont également réalisées par les maisons médicales. Certaines s’inscrivent dans des actions locales et participent à des actions de santé communautaire (aménagement de quartier, sensibilisation aux problèmes de pollution atmosphérique, actions de prévention,…).

Certaines développent également des projets comme la création d’un réseau de bénévoles, la mise en place d’un système d’échanges locaux (SEL), etc.

Très rapidement, pour répondre à leur objectif d’accès maximal à la santé, les maisons médicales ont développé une réflexion sur un mode de financement alternatif au payement à l’acte traditionnel. Aujourd’hui, si certaines maisons médicales fonctionnent toujours à l’acte, beaucoup d’entre elles ont choisi le paiement forfaitaire. Ce dernier est le résultat de négociations menées au sein de l’INAMI qui ont été possibles grâce à l’alliance avec des syndicats, des mutuelles et certains partis politiques. Le financement forfaitaire permet de répondre plus adéquatement, même s’il n’est pas parfait, aux objectifs fixés par les maisons médicales. Le patient en ordre de mutuelle s’inscrit à la maison médicale en signant un contrat ce qui lui permet de ne payer ni les consultations ni les visites. Il ne paie que sa cotisation à sa mutuelle. Cette dernière paie alors à la maison médicale une somme fixe mensuelle pour chaque personne qui y est inscrite. C’est en 1984 que la première maison médicale a mis en pratique ce système de financement forfaitaire.

Une autre caractéristique majeure des maisons médicales est leur mode de fonctionnement en autogestion et leur non-hiérarchie interne qui indiquent par ailleurs leur ancrage fort dans la racine coopérative de l’économie sociale. Leur finalité de services à des usagers et la référence au cadre territorial marquent d’autre part bien leur référence à l’associatif d’intérêt général. La prise de conscience de cette double appartenance, que l’on retrouve chez de nombreux acteurs d’économie sociale, devrait permettre aux maisons médicales, comme le dit bien Marthe Nyssens , de se poser les questions sur les enjeux qui sont les leurs : autogestion, égalité des salaires, relations aux clients, rôle d’innovation sociale et rôle d’interpellation, tension entre viabilité économique et objectif social, etc. Autant d’enjeux et de questionnements qui animent d’autres structures d’économie sociale et qu’il serait intéressant de débattre ensemble.

Source 

 

Pays: 

Belgique