On parle des Scop dans le journal Le Monde !

Thursday, 12 May 2016

C'est assez rare pour être souligné, un grand quotidien français parle d'un autre modèle d'entreprendre. Les Scop, pour "Sociétés coopératives et participatives", sont une forme d'entreprise qui ne date pas d'hier, et pourtant reste largement méconnue du grand public. Si l'initiative du journal Le Monde peut être saluée positivement, on regrette néanmoins que la complexité et la technicité du texte ne facilitent pas l'appréhension de cette coopérative "Made in France".

Le modèle Scop existe depuis plus d'un siècle. Dès son origine, durant la première moitié du 19è siècle, les premières Scop (signifiant alors "sociétés coopératives ouvrières de production") sont apparues en faveur de l'émancipation des travailleurs, autour de la défense d'un intérêt collectif et de principes de gouvernance démocratique. Concrètement, ces coopératives sont des "sociétés de personnes" et non des "sociétés de capitaux", qui désignent les entreprises capitalistes dites "classiques". Cette différence explique que, dans ces entreprises, les salariés sont majoritairement propriétaires du capital, et non quelques actionnaires dont l'unique intérêt est la recherche de profit. De cette propriété collective découle un droit de vote plus équitable lors des assemblées générales, lequel dépend des statuts et de la qualité des membres, tout en respectant en principe l'équation "1 personne = 1 voix", et non "1 part = 1 voix".

Dans toutes ces spécificités réside le véritable changement pour le salarié qui y travaille : il peut participer aux prises de décisions stratégiques, managériales ou opérationnelles de l'entreprise. Concrètement, cela signifie qu'il peut voter son salaire et celui des autres, élire ses dirigeants, et être consulté sur l'avenir de son entreprise. De ce fait, on est bien loin du modèle entrepreneurial classique, dont on entend presque tous les jours les déboirs : licenciements, délocalisations, etc. En raison de leur spécificité statutaire, et des principes organisationnels qui les gouvernent, les Scop appartiennent au champ de l'ESS. En outre, les Scop oeuvrent souvent pour des finalités sociales et environnementales : développement durable, formation et conseil, ou lutte contre l'exclusion.

En France, le réseau des Scop accompagne la création, la reprise et la transformation d’entreprises sous forme Scop (Société coopérative de production) ou Scic (Société coopérative d’intérêt collectif). Il propose un service complet aux entrepreneurs : accueil, accompagnement dans la durée, financements, formations, échanges entre entrepreneurs, représentation auprès des pouvoirs publics. Le mouvement rassemble aujourd'hui 2 222 Scop et 408 Scic employant respectivement 47 500 et 3 300 salariés (chiffres en 2014). Son formidable essor depuis les années 80 (voir graphique "L'évolution croissante du mouvement" dans l'article du Monde), s'explique en partie par l'impact de la mise en place de législation les concernant (par exemple, la loi de 1978 portant statut des Sociétés coopératives ouvrières de production). La loi ESS de 2014 vint ensuite renforcer la reconnaissance et la visibilité de cette catégorie spécifique de coopérative.

Il n'y a pas que dans l'hexagone que ce modèle séduit. En Belgique aussi, un mouvement naissant tente d'importer cette forme alternative d'entreprise, malgré tous les obstacles légaux freinant leur développement. Ses partisans engagent actuellement des initiatives de lobbying pour qu'une législation soit votée aux niveaux régional et/ou fédéral. Pour le moment, il est en effet très compliqué de créer une Scop sur le modèle français en adoptant le statut de Société coopérative à responsabilité limitée (SCRL). La question des statuts légaux est de première importance pour permettre le développement des coopératives. Dans un grand nombre d'États européens, aucune législation applicable ne reconnaît la particularité des modèles coopératifs.

Le think & do tank POUR LA SOLIDARITÉ - PLS publiera prochainement une Note d'analyse sur les coopératives de travail-associé en Europe. Pour en être informés, abonnez-vous à la Newsletter de l'Observatoire de l'ESS, ici.